Dans un contexte national marqué par la recrudescence des faits divers et des affaires judiciaires médiatisées, deux notions font souvent l’objet de confusion dans l’opinion publique : être fugitif ou être porté disparu. Pourtant, aux yeux de la loi guinéenne, ces deux statuts juridiques sont bien distincts et ont des implications radicalement opposées.
Fugitif : recherché par la justice
En droit guinéen, un fugitif est une personne qui échappe volontairement à une procédure judiciaire en cours, notamment :
- Après avoir été mis en cause dans une enquête pénale ;
- Après un mandat d’arrêt délivré par un juge ;
- Ou encore après s’être évadé d’une garde à vue ou d’un établissement pénitentiaire.
Maître Abdoulaye Kourouma, avocat au barreau de Conakry, explique :
« Un fugitif est quelqu’un qui sait qu’il est poursuivi, et qui organise sa fuite pour éviter la justice. Il devient alors l’objet d’une recherche policière nationale, voire internationale via Interpol. »
Dans les dossiers sensibles de corruption, d’agressions sexuelles ou d’escroqueries à grande échelle, les cas de fuite de suspects sont fréquents, alimentant les fantasmes populaires sur les réseaux sociaux. Mais il faut distinguer la fuite intentionnelle d’une disparition subite et involontaire.
Personne disparue : potentielle victime
Contrairement à un fugitif, une personne disparue n’est ni accusée ni soupçonnée d’un crime. Il s’agit plutôt d’un individu dont la localisation est inconnue et dont la disparition est jugée préoccupante par ses proches ou par les autorités.
Selon la Direction de la Police Judiciaire (DPJ), la Guinée a enregistré plus de 65 cas de disparitions signalées au cours de l’année 2024, dont plusieurs concernent des enfants et des femmes.
Colonel Fodé Bangoura, responsable à la DPJ, souligne :
« Une personne disparue est avant tout considérée comme une victime. On ne la traite jamais comme un délinquant. L’objectif est de la retrouver, en bonne santé si possible. »
Par exemple, les cas fréquents d’enfants fuguant les foyers ou de femmes victimes de mariages forcés et qui s’échappent sont souvent d’abord classés comme « disparitions inquiétantes », avant toute autre qualification.
Deux traitements juridiques, deux destins différents
Statut | Fugitif | Disparu |
---|---|---|
Qualification légale | Recherche pour fuite devant la loi | Recherche pour disparition inquiétante |
Statut judiciaire | Suspect ou condamné en fuite | Victime potentielle |
Objectif des forces | Localiser pour arrêter | Localiser pour protéger |
Répercussions | Procès, incarcération | Assistance, protection |
L’appel des autorités : « Ne confondez pas les deux »
Les services de sécurité appellent les médias et le public à faire preuve de rigueur terminologique. Confondre un fugitif et une personne disparue peut ternir une réputation injustement ou ralentir une enquête.
« Chaque minute compte quand il s’agit de retrouver un enfant disparu. Mais si l’alerte est détournée par de fausses accusations de fuite ou de crime, on perd du temps précieux », avertit un officier de l’OPROGEM.
Dans une société où les réseaux sociaux démultiplient les informations non vérifiées, il est essentiel que les journalistes, les citoyens et les autorités utilisent les bons termes : un fugitif fuit la justice, un disparu pourrait fuir le danger.
Un cadre légal clair, une communication responsable et une meilleure sensibilisation permettront d’éviter les amalgames qui peuvent coûter cher – à la vérité, à la justice, et surtout aux victimes.
La Rédaction