Un Comité d’experts indépendants de l’ONU s’est dit, vendredi préoccupé, par la persistance des « violences racistes, des discours de haine et des incidents xénophobes » au Royaume-Uni, notamment les récentes violences commises lors des émeutes de l’extrême droite de cet été.
Tout en prenant note de la réaction rapide de Londres à l’enquête sur les récentes émeutes racistes et des diverses mesures adoptées pour lutter contre les crimes de haine, les experts du Comité de l’ONU pour l’élimination de la discrimination raciale (CERD) se sont préoccupés par « les actes et les violences racistes récurrentes contre les minorités ethniques et ethnoreligieuses, les migrants, les réfugiés et les demandeurs d’asile commis par des individus et des groupes suprématistes blancs et d’extrême droite, y compris les actes violents commis à la fin du mois de juillet et au début du mois d’août ».
Des émeutes ont touché des villes et villages d’Angleterre et d’Irlande du Nord, suite à l’attaque au couteau qui a coûté la vie à trois fillettes le 29 juillet. Des rumeurs sur le suspect, présenté de manière erronée comme un demandeur d’asile musulman, ont été diffusées par d’influents comptes d’extrême droite sur les réseaux sociaux, conduisant à cette explosion de violence xénophobe et raciste dans la rue dès le lendemain de l’attaque.
Des actes racistes et xénophobes récurrents
Dans ses conclusions et recommandations publiées aujourd’hui à Genève, le Comité note que cette forte augmentation des crimes de haine, des discours de haine et des incidents xénophobes est signalée sur diverses plateformes (médiatiques et des réseaux sociaux) et de la part de politiciens et de personnalités publiques.
Ces discours de haine visent généralement les Tziganes, les Roms, les gens du voyage, les personnes d’ascendance africaine et asiatique, les personnes d’origine arabe, les personnes appartenant aux communautés juive, musulmane et hindoue, ainsi que les migrants, les réfugiés et les demandeurs d’asile.
Le Comité, chargé de surveiller l’application par les États parties de la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale, appelle donc le Royaume-Uni à l’action en mettant en œuvre des mesures visant à « réduire les discours de haine raciste et la rhétorique xénophobe, y compris de la part de personnalités politiques et publiques ».
Il s’agit ainsi de renforcer les mesures de lutte contre la prolifération des discours de haine raciste sur Internet et dans les médias sociaux, en étroite collaboration avec les fournisseurs d’accès à Internet, les plateformes de médias sociaux et les communautés les plus touchées par les discours de haine raciste. Face aux crimes de haine raciste, le Comité a souligné la nécessité d’enquêtes approfondies et de sanctions sévères pour les crimes de haine raciste, ainsi que de voies de recours efficaces pour les victimes et leurs familles.
Des mesures pour éliminer la discrimination raciale au sein de la police
Sur un autre plan, le Comité s’inquiète du racisme institutionnel au sein de la police et du système de justice pénale et pointe du doigt la présence policière dans les écoles où la proportion d’enfants appartenant à des minorités ethniques est la plus élevée, mais aussi certaines pratiques policières, notamment lors des interpellations et des fouilles, qui visent plus particulièrement les enfants d’origine africaine.
Il s’est également alarmé du l’usage « excessif et mortel » de la force par les forces de l’ordre, qui touche « de manière disproportionnée les personnes d’ascendance africaine et les autres minorités ethniques ».
Le Comité a donc exhorté Londres à mettre en place un mécanisme de plainte indépendant pour enquêter sur les allégations de profilage racial, de pratiques d’interpellation et de fouille, de fouille à nu et d’usage excessif de la force par la police. Il a demandé que les auteurs soient poursuivis et sanctionnés et a souligné la nécessité pour les victimes et leurs familles d’avoir accès à des voies de recours efficaces.
En outre, il recommande de prendre des mesures décisives pour éliminer la discrimination raciale au sein de la police et du système de justice pénale, y compris sa dimension institutionnelle.
Hausse de plus de 300 % des incidents islamophobes et de plus de 500 % des actes antisémites
Le Comité pour l’élimination de la discrimination raciale (CERD), qui est composé de 18 experts indépendants, a examiné les 13 et 14 août la situation au Royaume-Uni, dans le cadre d’un examen régulier. Lors de l’examen de son rapport, Londres avait rappelé son « approche holistique de la prévention de la violence et des troubles à l’ordre public ».
« Le gouvernement fait tout ce qui est en son pouvoir pour atténuer les futurs incidents violents », avait insisté la délégation lors de son passage à Genève.
Plus largement, le Royaume-Uni avait affiché sa à « éradiquer la discrimination à l’encontre de toutes les minorités ethniques ». Il a indiqué travailler avec les communautés locales pour répondre à leurs besoins de la manière la plus efficace.
La délégation a déclaré que le gouvernement s’était engagé à lutter contre toutes les formes de crimes de haine à l’encontre de tous les groupes. Dans les quatre mois qui ont suivi le début du conflit entre Israël et le Hamas, les incidents haineux signalés à l’encontre des musulmans ont augmenté de plus de 300 % et les incidents antisémites de plus de 500 %.
Le gouvernement s’est donc engagé à financer 20 % des coûts des organisations islamiques et juives en tant que mesure de protection. « Les personnes qui commettent des crimes de haine à l’encontre de ces groupes sont condamnées à des peines plus lourdes », a insisté Londres.