Le journaliste guinéen Sekouba Djatto Fofana a effectivement été contraint à l’exil après avoir dénoncé le non-respect des engagements pris par les autorités de la transition en Guinée, notamment sur la liberté d’expression et le respect des droits humains.
Dans une interview accordée à notre rédaction de Bambouguinee.com, Sékouba Fofana explique les éléments clés de cette affaire qui lui ont contraint à l’exil.
Rédaction : Pourquoi avez-vous dû quitter la Guinée ?
Sekouba Fofana : « Après plusieurs dénonciations et interventions exigeant le respect des engagements de la transition (liberté de la presse, fin des arrestations arbitraires), j’ai reçu des menaces directes. Des proches du pouvoir m’ont averti : ‘Tu déranges trop.’ Des collègues ont été emprisonnés pour moins que ça. Je n’ai pas eu le choix. »
Rédaction : Quels engagements n’ont pas été tenus ?
Sékouba Fofana : La junte promettait : Des élections libres en 2025 . Aucune date crédible n’est fixée.
La fin de la répression. Au moins 7 journalistes sont détenus aujourd’hui. Pour un dialogue national inclusif, seuls les partis ‘soumis’ sont consultés. Le CNRD [Comité national du rassemblement pour le développement] agit comme un pouvoir absolu. »
Rédaction : Comment la presse est-elle muselée ?
Sekouba Fofana : « La stratégie est subtile : Censures déguisées : Couper Internet lors de manifestations. Procès bidons : ‘Diffamation’, ‘trouble à l’ordre public’…
Intimidation économique : Publicités étatiques retirées aux médias critiques.
Même les radios communautaires sont surveillées. »
Rédaction : Que demandez-vous à la communauté internationale ?
« Ne vous laissez pas berner par les discours de ‘transition’. La réalité, c’est : Des militaires qui s’accrochent au pouvoir.
Un peuple privé de voix.
Pression pour des sanctions ciblées contre les responsables des violations ! »
Rédaction : Un message aux jeunes Guinéens ?
Sekouba Fofana : « Résistez, mais prudemment. Utilisez les réseaux sociaux, documentez les abus. Notre histoire ne doit pas être écrite par les bourreaux. »
La transition guinéenne est un leurre pour beaucoup d’observateurs.
L’exil des journalistes prive le pays de contre-pouvoirs.
L’urgence d’une mobilisation africaine et internationale.
La Guinée sous la transition militaire
Depuis le coup d’État du 5 septembre 2021 (mené par le CNRD dirigé par le colonel Mamady Doumbouya), le pays est gouverné par une junte militaire promettant une transition vers un pouvoir civil, avec des engagements initiaux :
– Retour à l’ordre constitutionnel.
– Lutte contre la corruption.
– Garantie des libertés publiques (dont la liberté de la presse).
Le dos au mur, Sekouba Fofana communément appelé El Hadj Djatto a pris le micro.
Son combat
Il a publiquement exigé que la junte tienne ses promesses, notamment via des éditoriaux et des interventions dans les émissions de large audience.
Conséquences pour lui
– Menaces et pressions : Harcèlement judiciaire, intimidations par des soutiens du régime.
– Exil forcé : veuf depuis 2021 et père deux enfants dont une fille, Sekouba Fofana a quitté la Guinée son pays natal pour éviter selon lui des poursuites ou une détention arbitraire (comme d’autres figures médiatiques avant lui).
Réactions internationales
ONG : Reporters sans frontières (RSF) et la Fédération internationale des journalistes (FIJ) ont alerté sur la dégradation de la liberté de la presse en Guinée.
Diplomatie : L’UE et l’ONU ont appelé à un retour à l’État de droit.
Situation actuelle de la liberté de la presse en Guinée
Classée 114ᵉ sur 180 (RSF 2024) → Environnement « difficile » pour les journalistes.
Autres cas récents:
– Suspension de médias (ex : Espace TV).
– Arrestations pour « diffamation » ou « menace à l’ordre public ».
L’affaire Fofana illustre :
1. L’écart entre les promesses de la transition et la réalité.
2. La répression persistante contre les voix critiques.
3. Les risques encourus par les journalistes en Guinée.
El Hadj Djatto, absent du pays depuis maintenant plusieurs mois, estime en ces termes : des actions civilo – militaires se jouent à ciel ouvert actuellement en Guinée concernant la campagne camouflée du général Mamadi Doumbouya et de la volonté de s’éterniser au pouvoir. Une attitude peu républicaine qui n’encourage probablement pas un retour des exilés au pays, une manière d’éviter à sa famille ce qui est arrivé à d’autres confrères portés disparus comme Marouane Camara.
La Rédaction