Depuis 2007, la République de Guinée fait l’objet d’une interdiction d’exportation de ses produits halieutiques vers l’Union européenne (UE). Une mesure sévère, prise par Bruxelles pour sanctionner le pays pour sa lutte insuffisante contre la pêche illégale, non déclarée et non réglementée (INN) dans ses eaux maritimes.
Une « carte rouge » infligée par l’UE
L’interdiction est la conséquence directe de l’échec de la Guinée à mettre en œuvre des mécanismes efficaces de surveillance de ses zones de pêche et à sanctionner les navires étrangers opérant sans autorisation. En 2013, la Commission européenne avait placé la Guinée sur la liste noire des pays « non coopérants » en matière de lutte contre la pêche INN, aux côtés du Belize, du Cambodge et du Sri Lanka.
Selon un rapport de la Commission européenne, la Guinée manquait :
- de contrôle des navires battant pavillon étranger opérant dans ses eaux ;
- de sanctions dissuasives contre les infractions constatées ;
- de systèmes de traçabilité et de certification des captures, comme exigés par les normes européennes.
« L’objectif de l’UE n’est pas de punir, mais de pousser les pays à assainir leur secteur halieutique pour préserver durablement les ressources marines mondiales », avait déclaré la commissaire européenne Maria Damanaki en 2014.
Conséquences économiques pour la Guinée
L’interdiction a eu un impact économique considérable pour la Guinée, qui perd ainsi un marché stratégique. Avant 2007, l’Union européenne représentait près de 60 % des exportations halieutiques guinéennes, avec des revenus estimés à plusieurs millions d’euros par an.
Des centaines d’emplois directs et indirects dans le secteur de la pêche industrielle et artisanale ont été affectés, en particulier dans les villes côtières comme Conakry, Boffa et Kamsar.
Tentatives de redressement
Depuis plusieurs années, les autorités guinéennes ont entrepris des réformes institutionnelles avec l’appui de partenaires comme la FAO, l’UE elle-même, ou encore la CEDEAO. Parmi les efforts notables :
- La mise en place de patrouilles de surveillance maritime avec l’appui de la marine nationale.
- L’adoption d’un nouveau code de la pêche.
- La signature d’accords régionaux de coopération pour lutter contre la pêche illicite.
En 2016, l’UE avait salué certains progrès en retirant temporairement la Guinée de sa liste noire, mais les exportations n’ont jamais été totalement rétablies, faute de garanties suffisantes sur la chaîne de traçabilité.
Vers une levée partielle de l’interdiction ?
Des discussions techniques ont été relancées en 2024 entre Bruxelles et Conakry. Selon des sources proches du dossier, une mission d’évaluation européenne est attendue en 2025 pour réexaminer les systèmes mis en place par la Guinée.
« Le retour de la Guinée sur le marché européen dépendra de sa capacité à démontrer la fiabilité de ses contrôles et de la légalité de ses exportations », affirme un expert de la Direction générale de la pêche à Bruxelles.